mercredi 27 mai 2009

Cause & effect

Ce que les gens appellent ordinairement "destinée" n'est rien d'autre que la manifestation de la Loi de causalité. Le bouddhisme élucide la loi de causalité de deux façons : superficielle et profonde, phénoménale et essentielle.

Le premier concept, appelé en japonais inga iji, implique qu'il s'écoule un certain laps de temps entre la cause et l'effet. Un exemple typique est celui de la plante semée au printemps qui porte ses fruits en automne.
Le second, appelé inga guji, implique la simultanéité de la cause et de l'effet.
La différence entre ces deux points de vue consiste à envisager le principe de cause et d'effet soit d'après les phénomènes, soit d'après leur essence.

Reprenons l'exemple de la graine : Il faut effectivement un certain laps de temps entre le moment où la graine est plantée et celui où elle porte ses fruits; elle ne peut porter ses fruits que si elle est mûre. Mais par ailleurs, dès que la graine est semée, l'effet, c'est-à-dire les fruits en automne, sont déjà une potentialité intrinsèque. Ainsi, en considérant la loi de cause et d'effet dans une perspective temporelle différente, nous pouvons dire qu'en toute chose, dans l'univers, existe une loi de simultanéité de la cause et de l'effet.

D'un point de vue bouddhique, le principe de inga guji implique que la boddhéité (effet) et les neufs états (cause) coexistent dans la vie humaine. Au contraire, selon le principe d'inga iji, chacun des dix états (de l'état d'enfer à l'état de bouddha) est séparé des autres, existe dans un lieu différent. Ceux qui édifient leur vie sur cette notion considèrent inévitablement l'état de vie le plus élevé comme quelque chose d'inaccessible dans cette vie, ce qui peut les conduire à la dépression ou au nihilisme. Le principe d'inga guji, au contraire, ou celui de la coexistence des dix états dans la vie humaine, permet de vivre de manière dynamique, avec une forte détermination sans cesse renouvelée.

Si l'on considère un seul instant d'existence, il est clair qu'il est l'effet présent d'une cause passée, en même temps que la cause présente d'un effet futur. La nature même de la vie dans sa durée n'est qu'une succession d'instants présents. La cause et l'effet sont contenus dans ce moment d'existence. Ainsi, toutes les causes passées portent leurs fruits dans le présent et les causes présentes porteront leurs fruits à l'avenir. Cette Loi merveilleuse de la simultanéité de la cause et de l'effet est appelée . C'est maintenant, en cet instant, que la vie existe réellement. A un moment donné, nous pouvons nous sentir heureux ou malheureux, ressentir espoir ou découragement. De même que toutes les causes passées sont contenues dans un instant, notre façon d'agir ou de réagir ouvre l'avenir simultanément.

Cette simultanéité de la cause et de l'effet est l'une des caractéristiques essentielles de la vie. Elle n'implique ni commencement ni fin, ni une conception linéaire du temps allant du passé vers l'avenir. C'est la loi de causalité inhérente à chaque instant de vie.

Nichiren Daishonin dit dans le "Sokanmon Sho" : "Le passé, le futur et le présent semblent trois réalités distinctes, mais on ne peut les dissocier car elles ne sont qu'un seul principe dans un moment de vie".

Dans cette perspective, le moment de la mort prend une signification capitale. Personne ne peut éviter la mort; la qualité d'un être humain réside dans la conscience qu'il a de la mort. Pour ne pas être vaincu par la vie, il ne faut pas ménager ses efforts, ni manquer de courage pour affronter les difficultés et les surmonter. Nichiren Daishonin dit lui-même : "Tout d'abord, il faut apprendre ce qu'est la fin de la vie, ensuite les autres choses."

La mort s'inscrit dans chaque instant de la vie. Autrement dit, la vie est le bilan des causes et des effets créés par chaque individu. Sous l'angle de la causalité et de l'éternité de la vie, la mort d'un homme est l'instant le plus solennel de toute son existence. Le bouddhisme enseigne que les conditions dans lesquelles la mort survient déterminent le moment et les circonstances de la prochaine vie.

Le sens de la vie d'une personne et le degré de plénitude auquel elle parvient dépendent de la manière dont elle a su créer des valeurs et accomplir sa révolution humaine. C'est à cela que l'on mesure la différence entre une vie basée sur la Loi merveilleuse et une autre qui ne l'est pas.

Article paru dans "Troisième Civilisation" no. 336 d'octobre 1990. Troisième Civilisation est le journal de la Soka Gakkai France

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